PYTHAGORE
A l'âge de
quarante ans, au printemps de l'an 532 avant Jésus Christ, Pythagore quitte
Samos, son île natale, pour
s'installer à Crotone, en Italie du Sud.
Le philosophe
consulte avant de partir la Pythie de Delphes, Pythagore interprète positivement
les phrases de la prêtresse.
Il en résulte
pour lui toute une ascèse : ni indigestion, ni luxure, ni ivresse,
ni plaisanterie, ni colère.
« Le fils de
Silène a été tué prés du trépied par le serpent Python.» Ainsi parla la
Pythie.
Le futur
fondateur de l'école philosophique de Crotone fuit la tyrannie de Polycrate,
déçu par la politique du tyran qui ne l'emploie pas aux grands travaux tel que
la construction des temples, forteresses,
môles, tunnel géant.
Ainsi, Pythagore
part vers l'occident avec en tête la sagesse delphique :
Rien de trop ;
Connais-toi toi
même et tu connaîtras l'univers et les dieux ;
Accorde ta
caution, mais un malheur t'attend .
Ne fais pas le
dieu ;
Reconnais que tu
n’es qu'un homme ;
Si tu réponds
pour autrui, tu t'en
repentiras.
A l'homme, la
honte de son insuccès, au dieu, la gloire de la réussite.
Le siècle de
Pythagore ( né à Samos en 572 et mort à Métaponte en 493 avant Jésus Christ )
est bien celui des Sept Sages et de l'Oracle d'apollon à Delphes.
L'école de
Pythagore donnait ce savoir inséparable de la métaphysique qui était une
intuition de l'essence des choses. Le maître était persuadé que l'univers était
intelligible et nécessaire, il faisait du nombre ce principe d'explication
universelle. Il a cru que le secret ultime gît dans les lois de l'arithmétique
et de la géométrie.
Pythagore était
considéré par ses disciples comme l'incarnation d'un dieu, tout particulièrement
d'apollon, dieu de l'harmonie et de la raison d l'univers.
Groupés en
confréries, ses disciples installent leur école dans les principales villes de
la grande Grèce, d'abord à Crotone puis à métaponte, ensuite à Tarente et à
Locres. Ils essaimèrent dans toute
l'Italie.
Pythagore
entendait chanter les étoiles dans leur mouvement harmonieux. Il avait démontré
que l'étoile du matin et l'étoile du soir ne font qu'une.
Il déclarait
qu'il existe en un principe. Pythagore croyait aussi à la transmigration des
âmes donc à la réincarnation. Il ne mangeait aucune viande.
Seul le
pythagorisme pouvait justifier la croyance en la réincarnation des âmes par des
raisons tirées des sciences abstraites que nous portons tous en nous et dont
quelques-uns, à force d'ascèse, ont la révélation. Disons que Pythagore avait
pendant quarante ans, répandu en Grande Grèce des idées religieuses nouvelles et
fondé tout autre chose qu'un cercle d'études ou un club politique : un ordre
secret avec sa doctrine de salut, sa rigoureuse éthique, ses mystères et ses
martyrs. Ce
touche-à-tout de génie avait touché à Dieu.
Certainement par
l'inspiration de l'école pythagoricienne, les Grecs d'Italie du Sud frappent des
monnaies incuses qui affirment leur richesse, leur puissance.
Tarente avec son
dauphin qu'enfourche le héros Phalos ou avec une simple roue, le dauphin est à
I' origine du noms de Delphes, animal apollinien par excellence.
Métaponte avec
un épi qui représente la fécondité de la terre ainsi que le taureau pour
Sybaris.
Crotone grave
sur ses monnaies incuses le trépied de Delphes qui symbolise le passé, le
présent et le futur.
Elée, Velia
représente le lion qui signifie la puissance, la royauté et son attachement a
l'Asie son berceau original.
Seules Kaulonia
et Poseidonia montrent leurs dieux respectifs : Apollon pour Kaulonia et
Poséidon pour Poseidonia, le dieu de la mer, divinité importante pour les colons
venus de I' Orient par bateau.
Les
pythagoriciens de stricte observance, les purs qui proscrivaient toute
nourriture carnée et évitaient tout contact avec les cuisiniers, les bouchers et
les chasseurs, renonçaient a accomplir l'acte majeur de la religion politique,
créaient véritablement une religion nouvelle et qui plus est, une religion de
salut individuel.
La
secte d'ailleurs ne sera pas toujours aussi exigeante. Des disciples
accepteront de consommer certaines parties de certaines victimes,
vertus d'une casuistique bien subtile, et pour participer, autrement
que par le renoncement, au salut de la cité. Il paraît
même que le maître n'avait pas toujours été
végétarien et qu'il avait conseillé de nourrir les
athlètes
grecs de viande.
Les
pythagoriciens avec tous leurs interdits alimentaires et sexuels, leurs costumes
blancs et leurs offrandes pures, gâteaux, miel ou encens, ne faisaient que
renchérir sur de telles pratiques dont Epiménide, initiateur du maître, s'était
fait en Crète et à Athènes le spécialiste raffiné.
En l'an 493 ses
disciples brûlèrent sa dépouille charnelle et considérèrent qu'il était remonté
dans les étoiles comme un dieu, comme Apollon qu'il avait toujours
été.
Selon Jamblique,
l'admission des fidèles, hommes et femmes, se faisait en plusieurs temps, nous
dirions même presque, en franchissant plusieurs degrés.
On enquêtait au
préalable sur la famille du candidat, son éducation, son caractère.
Pendant trois
ans, on vérifiait que le novice était vraiment désireux de s'instruire.
Puis pendant
cinq ans, il devait se borner à écouter le Maître et à vivre comme lui de la
manière la plus austère : on s'abstenait de certains mets, du rouget, du mulet
de mer, des viandes et des fèves par exemple, on évitait les relations
sexuelles, on s'habillait d'une simple tunique blanche, on ne buvait que de
l'eau.
Enfin l'élève,
s'il en était jugé digne, était admis à voir le Maître qu'il ne désignait jamais
que par le mot autos, pronom emphatique de la troisième personne.
Il enseignait sa foi, aussi vieille
semble-t-il que les peuples indo-européens, en la transmigration des âmes, mais
il la justifiait méthodiquement par des expériences courantes comme l'impression
du déjà vu, du déjà vécu, comme la réminiscence de pensées abstraites et
cohérentes que l'on n'avait jamais pu concevoir si on n'avait déjà connu une
autre vie.
Les merveilles des mathématiques, les
nombres principes universels, les points sans dimensions, l'harmonie du monde et
l'harmonie avec le monde, qui est le secret du bonheur, étaient des découvertes
dans la seule mesure ou nous les retrouvions.
La métempsycose
impliquait une chute ou une montée de l'âme, un jugement, une ascèse
nécessaire.
Retrouver les
vérités essentielles, c'était s'élever jusqu'au dieu que nous avions
été.
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